Dans quelle mesure les comportements des individus qui agissent conjointement sont-ils déterminés par les dynamiques de leurs interactions ? Dans le contexte de cette question, je me suis notamment intéressé à la manière avec laquelle les mouvements en interaction se conjuguent de manière synchronisée à de multiples échelles temporelles – du niveau « infra » des submovements aux corrélations à long-terme -. Pour cela, je me suis appuyé tant sur des tâches d’interactions sensorimotrices simples en laboratoire que sur des situations écologiques comme la danse en groupe ou la musique orchestrale, ou encore des situations hybrides en réalité virtuelle partagée.
Néanmoins, plusieurs résultats montrent que nos interactions consistent non pas seulement à synchroniser l’organisation de nos comportements respectifs, mais aussi à co-organiser nos a-synchronies.Il semble en fait qu’une focalisation trop intense sur les phénomènes de synchronisation obscurcisse une contrepartie fondamentale de nos activités collaboratives : la dé-synchronisation de nos patterns d’interactions.Cet aspect étant mieux connu et mis en pratique au cours d’activités telles que l’improvisation collective en musique ou en danse, j’ai progressivement intégré l’expérience des improvisateurs en hybridant mes recherches avec des approches qualitatives au cours de collaborations trans-disciplinaires (écoles de musique, cours de danse, groupe de jazz..). En proposant une synthèse de ces travaux, je chercherai à montrer en quoi la dialectique entre synchronie et dé-synchronie fonde nos dynamiques d’interactions sensori-motrices et est vectrice de créativité individuelle et collective.